Obsolescence programmée

Le droit à la réparation et la lutte contre l’obsolescence programmée

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Nous avons pris l’habitude d’utiliser et de jeter. Les vêtements nous durent un an, non seulement parce qu’ils se démodent, mais aussi parce qu’ils se détériorent rapidement. Un téléphone portable de plus de deux ans est déjà obsolète, tout comme une voiture de plus de cinq ans. Ce n’est pas une coïncidence, mais une stratégie très calculée.

Cette frénésie d’achat et de renouvellement constant produit de grandes quantités de déchets, notamment électroniques, qui, dans le cas de l’Union européenne, représentent plus de 2,5 milliards de tonnes par an. En effet, les fabricants mettent en vente des produits qui sont conçus pour tomber en panne ou devenir non fonctionnels. Par exemple, les batteries au lithium perdent inévitablement leur capacité de charge avec le temps, mais cela ne doit pas nous obliger à remplacer tout le téléphone portable au lieu de remplacer la batterie.

Par exemple, en 2017, la loi américaine a contraint Apple à proposer des remplacements de batterie pour l’iPhone 6 et les modèles ultérieurs à un prix réduit, après qu’il a été révélé que l’entreprise ralentissait volontairement les anciens téléphones à chaque mise à jour logicielle, sous prétexte de prolonger l’autonomie de la batterie.

Selon une enquête, 79 % des citoyens européens estiment que les fabricants devraient être tenus de faciliter la réparation des appareils numériques ou le remplacement des pièces détachées, et 77 % préfèrent réparer leurs appareils plutôt que d’en acheter de nouveaux.

Le 7 avril, le Parlement européen a fixé des priorités sur le « droit à la réparation », ce qui a donné lieu à une proposition de la Commission prévue pour le troisième trimestre de 2022. L’objectif est de parvenir à un modèle d’économie circulaire d’ici à 2050, ce qui implique le partage, la location, la réutilisation, la réparation, le renouvellement et le recyclage des matériaux et des produits existants autant de fois que possible pour prolonger leur cycle de vie.

Le droit à la réparation et ses ennemis

L’obsolescence programmée est présente dans de nombreux produits aujourd’hui, des voitures aux téléphones en passant par les appareils ménagers. L’origine de l’obsolescence planifiée est attribuée à l’industrie automobile américaine. Dans les années 1920, le marché automobile américain est saturé et les ventes commencent à chuter. Pour éviter cela, Alfred P. Sloan Jr., cadre de General Motors, a suggéré de lancer de nouveaux modèles chaque année.

Outre les voitures, l’obsolescence programmée touche tous les appareils électroniques, des ordinateurs aux téléphones portables, en passant par les appareils ménagers, les logiciels informatiques, la mode, les chaussures, les jouets, les manuels scolaires et même les meubles. Le droit à la réparation est un mouvement qui a vu le jour au début des années 2000 en réponse à la quantité croissante de déchets électroniques générés. L’objectif de ce mouvement est de permettre aux consommateurs de réparer plus facilement leurs propres appareils, plutôt que de devoir les remplacer.

En 2012, l’État américain du Massachusetts est devenu le premier à adopter une loi sur le droit à la réparation pour les automobiles, obligeant les fabricants à mettre les informations relatives au diagnostic et à la réparation à la disposition des ateliers de réparation indépendants et des consommateurs individuels. La même année, l’Union européenne a adopté la directive sur les déchets d’équipements électriques et électroniques, qui oblige les fabricants à fournir aux consommateurs des informations sur la manière de réparer leurs produits.

La directive a également établi des règles pour la collecte et le recyclage des déchets électroniques. Plusieurs États membres ont adopté des lois basées sur cette directive, comme le programme en Suède qui permet d’échanger ses vieux appareils contre des nouveaux à prix réduit, ou la loi en Finlande qui a introduit une loi obligeant les fabricants à vendre des pièces de rechange pour les appareils.

Toutefois, cette première directive était ambiguë et sa mise en œuvre dans les différents pays de l’UE était inégale. La nouvelle résolution du Parlement insiste sur le fait que les appareils doivent être plus durables, plus faciles à réparer et comporter des pièces qui peuvent être retirées et remplacées. Elle demande également des règles harmonisées concernant l’information des consommateurs sur les réparations et les extensions de garantie.

Plus de temps pour réparer, plus d’instructions sur la façon de le faire

En France, cette année a vu l’entrée en vigueur de la loi générale actualisée sur la protection des consommateurs. Cette réforme introduit des changements qui protègent le droit des consommateurs à la réparation. La première est l’extension de la garantie d’un produit de deux à trois ans. Cela couvrirait tout défaut de fabrication survenant pendant cette période. En outre, les fabricants doivent disposer de pièces de rechange pour les produits pendant dix ans après leur rappel, au lieu de cinq ans actuellement.

Selon l’ancienne législation, pendant les six premiers mois, le défaut était présumé être un défaut de fabrication, mais au-delà, le consommateur devait prouver qu’il n’avait pas fait un mauvais usage de l’appareil. Cette période est portée à deux ans en vertu de la nouvelle loi. Le gouvernement français est allé plus loin avec son indice de réparabilité, une note qui indique si le produit est plus ou moins réparable.

Toutefois, il existe d’autres stratégies mises en œuvre par les fabricants pour encourager les consommateurs à remplacer plutôt qu’à réparer. L’un d’eux est le logiciel, qui est beaucoup plus difficile à contrôler. C’est ce qui se produit lorsqu’un vieil ordinateur ou un vieux téléphone n’est plus compatible avec une nouvelle version du système d’exploitation. Le Parlement souhaite également que ces mises à jour soient réversibles et n’affectent pas les performances, et que les anciens modèles aient la garantie de pouvoir les utiliser pendant une période à déterminer.

Le droit à la réparation est fondamental pour la santé environnementale de la planète. La conséquence la plus immédiate de l’obsolescence programmée est l’augmentation des déchets technologiques, qui finissent par être traités dans les pays en développement et sont très polluants. De plus, les cycles de fabrication toujours plus courts consomment de plus en plus de matières premières, dont certaines sont rares et stratégiques, comme le coltan pour les antennes ou le lithium pour les batteries. En plus d’être un droit, la réparation est une nécessité.

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